LE METIER DE TRANSCRIPTEUR BRAILLE

 

Une harmonieuse répartition des tâches pour répondre aux besoins spécifiques d'un public

 

Ou comment s'organisent ces professionnels qui adaptent, traduisent, excellent dans la mise au point du prêt-à-lire pour les déficients visuels...

 

« L’UATB, Unité d’Adaptation et de Transcription Braille, est un Service chargé de pallier la carence de manuels scolaires braille sur le marché, c’est un Service chargé d’adapter en caractères agrandis, en braille ou en relief les documents pédagogiques dont les élèves ont besoin. »

 

C’est ainsi que Madame Soriano, responsable du Service, décrit le rôle de cette tour de contrôle au sein de l'établissement où intervient quotidiennement une équipe de trois spécialistes au statut différent . 

 

«  Monsieur Renard, non-voyant, est spécialisé dans le scan et la relecture des documents en vue d’obtenir des adaptations numériques,  Monsieur Speciale  répond essentiellement aux demandes des élèves pour l’E.R.D.V  tandis que je  gère les demandes pour les élèves scolarisés en milieu ordinaire » ajoute-t-elle.

 

 

  L’informatique, un outil au service du transcripteur et du déficient visuel…

 

« Pour réaliser cette activité première qui est de produire des documents adaptés en braille et en caractères agrandis, nous avons énormément recours à l’informatique et nous utilisons des logiciels spécifiques dont certains sont dits de transcodage braille (par exemple le logiciel VISIO, logiciel de dessins vectoriels ; le logiciel « Omnipages » qui va faire la reconnaissance des caractères), et des imprimantes spécifiques : imprimantes braille, imprimantes en noir qui nous permettent de produire du braille et des caractères agrandis, le four Piaf qui permet de produire des documents thermogonflés, c’est-à-dire mis en relief », le « scriba » bloc-note braille et terminal pour l’ordinateur, la synthèse vocale pour les techniciens non-voyants. »…

 

 

Trois étapes clés : transcrire, adapter, mettre en relief...

 

La transcription de documents consiste à traduire un texte en braille à partir de règles très précises. « Il faut respecter les normes » indique Madame Soriano « nous enregistrons toutes nos productions , nous sommes signataires de la Charte de l’Edition Adaptée(…), tous les documents que nous enregistrons sont susceptibles d’être demandés par l’extérieur. »

 

La chaîne de transcription intègre un scanner, un ordinateur avec un logiciel de reconnaissance de caractères et une embosseuse. A l’aide de logiciels adéquats, le typhlographe-transcripteur-adaptateur obtient un texte en braille.

 

« Une première saisie des données nous permet de générer d’autres fichiers. L’enseignant peut venir avec une feuille, une disquette ou une clé USB ou les numéros de pages du document dont il a besoin. Si on a besoin d’une adaptation numérique, on va passer sous un logiciel de traitement de texte et là on va adapter le fichier, on va l’encoder, on va travailler en relation directe avec les tables de code de l’iris » nous précise Madame Soriano accueillante et sur le qui-vive comme si toute l’équipe se préparait à réagir à une embuscade .

 

Elle nous invite de la main à nous approcher de son collègue non-voyant , lui aussi en faction, les doigts (pas seulement le petit!) actifs sur le clavier d’une drôle de machine. Monsieur Renard ôtant son casque : « cette machine c’est un scriba, c’est un peu la machine qui ressemble à l’iris, un aveugle grâce à cet appareil peut travailler avec un PC. Il lui permet d’afficher les lignes de l’ordinateur, le nombre de lignes et de caractères affichés à l’écran posent de nombreux problèmes aux aveugles. Je travaille également avec la synthèse vocale, l’ordinateur lit tout ce qu’il y a à l’écran du haut en bas.(…) Mon travail, c’est aussi un travail de mise en page parce que la ligne braille n’a que 30 caractères alors que la ligne en noir en possède 80 ou 60  (…) Le souci que j’ai c’est de me demander comment je peux rendre un texte le plus compréhensible possible. » nous dit encore Monsieur Renard.

 

Autre aspect de ce riche métier, l’adaptation nécessite en effet une analyse fine de la demande.

 

L’adaptation de documents consiste à transformer les compléments d’informations d’un écrit (tableaux, graphiques, images…) en une information pertinente pour le non-voyant. Le travail du transcripteur consiste alors à repérer le raisonnement pédagogique qui le conduira à réaliser, soit une adaptation en dessins en relief, soit une adaptation en linéaire, soit à ne pas adapter du tout.

 

Enfin, troisième volet du métier, l’impression en relief de documents grâce au thermogonflage : le document est imprimé sur un papier spécial- contenant des microbilles de plastique- puis chauffé uniformément, ce qui met en relief le dessin en noir. « En sortant le document du four, un miracle se produit… on utilise le thermogonflage partout où il y a des graphiques, des cartes, des dessins. Quand on peut expliquer un petit dessin, un graphique, on va se passer du relief. » déclare Monsieur Speciale maniant le papier à microcapsules en pleine démonstration avec la conviction et l’aisance de l’archer qui brandirait vivement sa dague contre l’ennemi .

 

   

Conditions de travail et formation au service d'une mission

 

 

« On travaille comme des employés de bureau pour des élèves qui sont des collégiens ou des lycéens aveugles et amblyopes» explique Madame Soriano. qui travaille 39 heures par semaine. Ambiance de bureau – et parfois d'imprimerie-, ruche calme où règnent rigueur, concentration et sens de l’organisation.

 

Mais la charge de travail est importante et si les dimensions des locaux ne sont pas celles du Major Oak (on voudrait que ce Service en ait la longévité!) il y aurait cependant de la place pour renforcer cette équipe qui ne dispose pas de temps de pause pour pouvoir répondre à la demande.. Le recrutement s'impose.

 

«La formation n'est pas vraiment définie. Avant d'intégrer le service, Monsieur Speciale était instituteur, Madame Soriano secrétaire et moi professeur d'allemand. Il faut avoir un bon niveau de culture littéraire et scientifique, être ouvert. » explique Monsieur Renard sous le regard approbateur de ses collègues. « J'adore ce que je fais »confie Madame Soriano « c'est un métier qui nous permet d'être dans le milieu de la culture et des techniques. On lit des choses qu'on ne lirait pas forcément, c'est un métier intéressant pour qui aime lire et apprendre. »

 

On frappe à la porte, il est 9H30. Madame Christiaens, responsable du Service imprimerie a besoin de consulter l'UATB pour terminer une tâche.

 

« Nous travaillons avec l'imprimerie qui répond à la demande spécifique de documents agrandis et scannés au format jpeg alors que nous nous sommes des spécialistes des documents en braille et mis en relief. » précise Madame Soriano tout en invitant sa collègue à entrer avant que nous sortions pour les laisser travailler car la demande de documents n'attend pas, paroles de Robin !